La cour des comptes récidive : elle veut en finir avec le statut !

La cour des comptes pré­co­nise :
— L’annualisation du temps de tra­vail, avec notam­ment l’intégration d’un for­fait annuel dans le temps de tra­vail des ensei­gnants pour impo­ser les rem­pla­ce­ments de courte durée dans les col­lèges et les lycées.
— La mise en place per­met­tant les échanges de ser­vice entre pre­mier et second degré.
— La biva­lence et la poly­va­lence des ensei­gnants du second degré.
— Une éva­lua­tion des ensei­gnants per­met­tant de tenir compte des résul­tats des élèves.
— Après la rému­né­ra­tion à la tête du client : le recru­te­ment, l’affectation et la muta­tion « au pro­fil » c’est à dire à la « tête du client ».

Source : snu­di Force Ouvrière Rhône 69

Y’a tout un PDF qui donne plus de détails.

Je sens que notre métier n’a pas fini d’en prendre plein la tête, la faute à ces “fai­néants” de profs.

Quand j’é­tais encore en maths info à la fac, pen­dant quelques temps j’ai hési­té à deve­nir prof de maths, je m’é­tais donc ren­sei­gné sur la manière d’y par­ve­nir, etc. Ces stats ne sont que mes obser­va­tions, mais j’a­vais décou­vert qu’à la louche 80% des étu­diants ne vou­laient plus faire prof de maths après un stage de 15 jours, quand ils ont com­pris la réa­li­té du métier, sur­tout avec un BAC+5 der­rière. La phrase qui reve­nait le plus était un truc du genre “je fais pas 5 années d’é­tudes pour me faire chier comme ça”. Moi-même j’ai vite aban­don­né l’i­dée.

Aujourd’­hui, plus per­sonne ne veut faire prof : c’est mal payé et on bosse comme des malades au point pour la plu­part de perdre son couple (ça m’est arri­vé, c’est arri­vé à beau­coup, *beau­coup* de jeunes profs : il faut que le conjoint accepte que son par­te­naire bosse jus­qu’à 22h tous les soirs, qu’on passe les WE à bos­ser, qu’on ne peut plus sor­tir, etc). C’est un métier génial quand on aime ça, mais notre bou­lot devient com­plè­te­ment notre vie, notre rythme de vie s’a­dapte com­plè­te­ment.

Pour ceux qui tiennent, on tolère ce métier dif­fi­cile, parce que jus­te­ment nous n’a­vons pas de patron dans l’é­ta­blis­se­ment qui vient lit­té­ra­le­ment nous cas­ser les c***lles, on nous fait confiance et on est maître à bord (de notre PME de 25 employés comme j’aime dire). Avec leur super mer­veilleuse réforme pro­po­sée par des gens n’ayant jamais mis les pieds dans une classe, le directeur/trice devient le supé­rieur hié­rar­chique, avec des rap­ports à faire.

Mes­sage à ces abru­tis : venez voir à quoi res­semble une salle des maîtres après 6 semaines de bou­lot, venez voir comme les profs n’en peuvent plus, sont tous au point de cra­quer. Le seul truc qui nous fait tenir, c’est la cohé­sion d’é­quipe, de rigo­ler ensemble, de rela­ti­vi­ser ensemble, de se créer sa petite bulle où l’on se sent bien, où l’on rigole d’un élève très dur à gérer, etc. Rajou­tez un supé­rieur là dedans, et c’est fini : s’il fau­dra faire atten­tion à tout ce que l’on dit, qu’on ne pour­ra plus s’ex­pri­mer libre­ment, ce sera le début de l’au­to-cen­sure, le début des vraies pertes de moral, le début des dépres­sions et des arrêts mala­dies.

Hé, ho : si vous man­quez de profs, c’est pas en leur rajou­tant une pres­sion sup­plé­men­taire que vous allez en recru­ter. Au contraire, allé­gez leur tra­vail, per­met­tez-leur d’a­voir au moins une pause pen­dant les récrées, per­met­tez-nous d’al­ler aux toi­lettes plus d’une fois toutes les 4h ! Payez les réunions que l’on fait sans arrêt (3 réunions par semaine sur le temps de midi + un mer­cre­di après midi de temps en temps, non payé, c’est TROP !). Met­tez-nous un psy, une infir­mière par école, his­toire qu’on arrête de faire leur bou­lot (NON, je ne sais pas faire une piqure d’in­su­line et je ne devrais pas savoir faire ! NON, je ne devrais pas expli­quer aux parents com­ment édu­quer leur gamin alors que je n’ai moi-même pas de gamins !). Ne jugez pas les profs sur les résul­tats de leurs élèves : n’im­porte quel prof vous dira qu’une classe, d’une année sur l’autre, n’a rien à voir : en com­por­te­ment et en niveau sco­laire. Com­ment vou­lez-vous que j’ap­prenne cor­rec­te­ment le fran­çais écrit et par­lé à des gamins qui ne le pra­tiquent pas chez eux parce que les parents sont allo­phones ? Magie des yeux, ils n’au­ront pas des bonnes notes ! Est-ce ma faute ? Dois-je être mal jugé pour cela ? Je ne mérite pas la même paie que la col­lègue qui elle a la chance d’a­voir un “bon petit fran­çais bien de chez nous avec les parents der­rière” ? Le prof de REP+ est voué à ne jamais être aug­men­té ?

Vous nous rajou­tez un jour de carence pour les arrêts mala­die. On est des fai­néants, c’est cela ? On s’ar­rête à la moindre occa­sion ? Vous savez que dès qu’on loupe un jour de classe, c’est le bor­del dans notre pro­gres­sion ? Tout ce qu’on avait pré­vu se décale, cela nous demande un bou­lot consi­dé­rable der­rière pour rat­tra­per ce retard sans rendre fou les gamins ? Avez-vous com­pris que la voix est notre outil de tra­vail ? Quand on a mal à la gorge, qu’on ne peut plus par­ler, on NE PEUT PLUS TRAVAILLER ? J’ac­cepte d’a­bî­mer mon corps pour mon tra­vail (ma voix a chan­gé en 3 ans de bou­lot, bor­del !, et en plus, on me puni pour cela ? Avez-vous déjà tenu une classe avec un mal de tête, un gros rhume ? C’est hor­rible, ça nous vide de toute éner­gie. Et pour­tant, on est tou­jours là. Même avec de la fièvre. Parce que c’est tou­jours une galère pas pos­sible pour être rem­pla­cé. On est là, parce qu’on ne veut pas lou­per. Quand on est absent, c’est que vrai­ment ce n’est plus pos­sible de venir tra­vailler. Et bien doré­na­vant, nous ne serons pas payés, nous serons punis, comme des enfants.

Et je ne parle pas du gel du point d’in­dice, qui fait que nos paies n’aug­mentent pas (20% envi­ron de paie en moins depuis 2001 par rap­port à l’in­fla­tion). La hausse des charges en plus.

Je ne parle pas de tous ces hon­nêtes gens qui parlent des profs à la TV sans les connaître et les fais pas­ser pour des gros fai­néants. Divi­sez pour mieux régner, allez‑y, créez un enne­mi com­mun : les profs fai­néants tou­jours en vacances. Tout le monde connait ce bou­lot en plus : tout le monde est pas­sé par l’école/collège/lycée. Sauf que voi­là, pour que quand on arrive le matin, qu’on pose son cul sur la chaise et la fiche de tra­vail est posée sur son bureau, y’a eu un énorme tra­vail der­rière, un tra­vail invi­sible mais pour­tant bien là. Il faut arrê­ter de croire qu’on connait ce tra­vail parce qu’on y est plus ou moins tous pas­sé. Vous n’êtes pas méde­cin quand vous allez consul­ter, vous n’êtes pas plom­bier quand vous voyez votre plom­bier tra­vailler, vous n’êtes pas ingé­nieur quand vous uti­li­sez votre voi­ture, alors svp, vous n’êtes pas prof parce que vous vous êtes assis sur une chaise chaque matin. Arrê­tez de juger les profs, et com­pre­nez qu’ils s’usent tous la san­té pour un unique objec­tif : celui de tirer le meilleur de votre enfant, pour un futur meilleur. Y’a pas de profs fai­néants, ce n’est pas pos­sible, c’est un bou­lot de malade tant au niveau pré­pa­ra­tion que de pape­rasse. Si le prof bosse mal ou pas à votre goût, c’est parce qu’il a trop de gamins à gérer, qu’on lui demande de gérer trop de choses, ce sont ses condi­tions de tra­vail qui ne vont pas. Nous n’a­vons pas tous la même éner­gie non plus : ne jugez pas trop vite.

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One comment

  1. Oh, on sent que ça vient du cœur,
    Mer­ci pour ce coup de gueule, et qui méri­te­rait d’être plus lar­ge­ment dif­fu­sé.
    Sur­tout à tout ceux qui pensent tout savoir, et jugent vite à coup de :“oui mais même s’il y en a qui bosse, y en a plein qui refont la même chose d’une année sur l’autre, qui pro­fite des vacances”, “et puis ça va, ils vont se plaindre en plus, ils ont un bou­lot pépère”…

    Bon en tout cas, j’ai appris un nou­veau mot dans ce billet, mer­ci ;)

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